Mode et foot, le carton plein
©Dior
Dior à Paris, Diesel à Milan, Fendi à Rome… Non, il ne s’agit pas du programme de la prochaine Fashion Week mais bel et bien des clubs de foot auxquels se sont récemment liées les maisons de luxe. Surprenant ? Pas tellement. Explications.
Le foot, ultime atout sportwear des marques de mode
Enfilez vos crampons et direction la pelouse, nouveau terrain de jeu des maisons de mode. C’est là que se trouvent leurs nouvelles coqueluches, les stars du football. Selon Thom Browne, elles semblent avoir visé juste, « j'ai toujours senti que les sportifs de classe mondiale sont les meilleurs modèles, réellement inspirants. L'image des joueurs dans leur costume est le reflet de la confiance et du caractère qui inspirent la jeunesse d'aujourd'hui ». Et ça tombe bien car cette jeunesse, c’est la cible numéro une des marques. C’est d’ailleurs pour cela que depuis quelques années, le sportwear est devenu la ligne de conduite à suivre permettant par la même occasion, de toucher du bout des doigts une culture plus large, plus street. Et le foot, à la fois pratique populaire et jeu fédérateur, est autant une question de sport, que de rue. Bingo, le luxe a trouvé son nouvel angle d’attaque.
En s’associant aux clubs, les marques redescendent (enfin) de leur piédestal pour venir côtoyer un milieu plus accessible à tous. Pas loin de 20 millions de personnes ont suivi la finale de la Coupe du Monde de foot en 2018 à la télé, l’une des meilleures audiences de l’année. Quel sport est capable de réunir autant de personnes ? Chaque fin de match important donne lieu à des défilés nocturnes (pas de mode cette fois-ci) en pleine rue où l’on se rassemble, on crie, on chante, on célèbre tous ensemble, unis par des liens que seul cette pratique semble capable de nouer. Ces nouveaux partenariats viennent ainsi affirmer la légitimité du luxe envers un univers qu’il se retenait bien d’approcher jusque-là.
Popularisation du luxe, luxurisation du foot
On assiste donc à une fusion de deux mondes dont la relation gagne en horizontalité. Cette fois-ci, pas de perdant, les deux y gagnent. Les maisons se popularisent autant que les clubs se luxurisent. Désormais, il devient aussi simple de parler du dernier match que du dernier défilé. Mais la distance entre l’élitisme de la mode et l’inclusion du football n’est pas si importante qu’on ne le pense et il se pourrait même que les deux aient quelques points communs, à commencer par cette démesure financière. Au vu des sommes mirobolantes mises sur la table pour s’offrir telle ou telle star du ballon, les sacs Dior, Fendi ou encore Giorgio Armani (nouveau partenaire de Naples après Kappa) et leurs prix exorbitants ont de quoi rougir. Autre point qui rassemble, le patrimoine. Une équipe sportive se place avant tout en étendard d’une nationalité fièrement assumée et d’un pays tout entier à l’héritage culturel unique auquel s’adosse le luxe pour entrer dans la surface.
Revendiquer son identité, défendre son patrimoine
Si auparavant, le patrimoine historique des grands noms de la mode passait surtout par un créateur emblématique, aujourd’hui elles vont plus loin. Elles se rattachent à d’autres domaines qui partagent les mêmes racines pour ne clamer leur identité qu’avec encore plus de ferveur. L’objectif est également de créer du lien, comme l’explique Moncler dans un communiqué de presse à propos de son partenariat avec l’Inter de Milan, « forgeant un lien vital entre deux marques emblématiques qui ont élu domicile à Milan ». Il s’agit à la fois d’une manière d’agrandir sa communauté – à titre d’exemple, le PSG compte 62 millions d’abonnés sur Instagram, le Real de Madrid en compte 124 millions – mais aussi d’abaisser des frontières jusqu’alors infranchissables.
Une volonté de devenir de plus en plus lifestyle
Il va falloir s’habituer à ce décloisonnement. Les maisons de mode ne font plus que de la mode et les équipes de foot ne font plus que du foot. La nouvelle tendance est au lifestyle. Il n’y a qu’à voir les récents projets de diversification du luxe entre restaurants, cafés et librairies. Pour Moncler, leur mission se résume ainsi, « aller au-delà du luxe et de la mode pour explorer de nouveaux environnements ». L’objectif, à travers cette stratégie semble d’incarner un nouveau style de vie pour se forger une nouvelle identité, plus en phase avec les attentes de la jeune génération – quitte à parfois s’éloigner, vraiment s’éloigner, de son cœur de métier. Et l’enjeu est similaire pour les clubs, à l’image du PSG qui « à travers ce partenariat […] poursuit son avancée pionnière dans l'univers de la mode et du lifestyle ».
Alors peut-on vraiment parler foot en front row et mode dans les gradins ? À vrai dire, cette nouvelle alliance relève davantage de la notoriété que de la conversion. L’idée pour les maisons, c’est de continuer à rayonner, à consolider leur image et à s’ouvrir au monde extérieur. Une ambition d’autant plus stratégique en vue du prochain mondial au Qatar en novembre. Et qui sait si l’on ne verra pas un supporter troquer son écharpe à l’effigie de son club préféré contre un foulard monogrammé d’ici là ?